Le tribunal administratif de Nice a rendu le 14 janvier dernier sa décision. La statue de Jeanne d’Arc qui trône depuis le 19 décembre à Borriglione devra être démontée parce qu’elle n’a pas été construite dans les règles. La régie Parcs d’Azur, à l’origine de la commande, a attribué le chantier à un atelier de créateurs sans passer par le marché public. C’était pourtant obligatoire. On vous explique.
Le 2 octobre 2023, la régie Parc d’Azur conclut un contrat avec les ateliers Missor pour concevoir une statue de Jeanne d’Arc. Valeur de l’ouvrage : 170 000 euros hors taxe. Problème : elle n’a pas lancé d’appel d’offres pour ouvrir le marché à la concurrence, comme cela doit être le cas pour toute dépense publique au-delà de 30 000 euros hors taxe. « Cela montre un degré d’incompétence ou de nonchalance assez dingue pour une ville de cette taille. Ce n’est pas compliqué de respecter le Code de la commande publique : cela permet d’avoir la meilleure œuvre d’art au meilleur prix », fustige l’élu écologiste d’opposition Jean-Christophe Picard.
Sans appel d’offre, le projet annulé
Suite à ce manquement, le préfet des Alpes-Maritimes a saisi le tribunal administratif qui a rendu sa décision le 14 janvier dernier : « la Régie Parcs d’Azur a attribué ce marché à la société Atelier Missor, sans publicité ni mise en concurrence. Le contrat conclu […] est annulé ». Un retour à l’état antérieur est donc imposé. En clair : la statue doit être démontée dans les plus brefs délais. La ville de Nice a fait appel de cette décision devant la cour d’appel administrative.
Un appel aux Niçois pour financer le maintien de la statue
En plus de son appel auprès de la justice, la ville de Nice a tenu à soutenir la souscription populaire lancée par André Barthe, ancien adjoint à la culture de la Ville. Dans un communiqué, elle invite « tous les citoyens de Nice et d’ailleurs qui le souhaitent à participer » au financement et au maintien de la statue. « Je ne céderai rien », défend Christian Estrosi.
Une atteinte au symbole Jeanne d’Arc
Le maire de Nice et d’autres politiques se sont insurgés contre ce retrait. L’élu d’opposition Philippe Vardon, soutien de Marion Maréchal, justifie cette procédure par la « haine de la gauche qui ne veut pas qu’on honore une sainte ». Il a annoncé une pétition pour demander l’annulation de la décision, tout comme le parti Reconquête. Les opposants estiment que ce qui a motivé le déboulonnement, c’est la volonté de ne pas honorer le personnage de Jeanne d’Arc, figure glorifiée principalement par les personnalités politiques de droite. Dans un tweet publié sur X le 16 janvier, le président de la régie Parc d’Azur, Gaël Nofri a qualifié cette décision de “dérive woke”.
La dérive woke que je dénonce depuis longtemps continue !
— Gaël Nofri (@GaelNofri) January 16, 2025
Faire une statue de Jeanne d'Arc en bronze pose probablement plus de problème qu'un buste de Che Guevara en papier toilette usagé.
Merci @cestrosi pour ces propos! Merci Prince @JoachimMurat et A. Barthe pour l'initiative! https://t.co/sOQH1wuE0r
Dans cette histoire, la neutralité de l’atelier Missor est également remise en cause, certains estimant que l’atelier est orienté politiquement. Un véritable combat idéologique est mené.
Un « délit de favoritisme » ?
Jean-Christophe Picard a saisi le procureur de la République au pénal pour « délit de favoritisme ». Sa plainte vise Gaël Nofri, responsable aux yeux de la loi. Selon l’élu, le procureur a rapidement ouvert une enquête à ce sujet, sans qu’Hexact ait pu se le faire confirmer. « Si j’étais maire de Nice et qu’un adjoint faisait ce genre de bourde, il serait limogé. Mais c’est Christian Estrosi, donc les gens sont maintenus en poste et ce n’est pas grave, ce sont les usagers ou les contribuables qui vont payer », raille l’élu d’opposition.
Une nouvelle plateforme pour la publication des marchés
Ironie du sort pour la ville de Nice, elle a inauguré le 6 janvier une nouvelle plateforme pour la publication des marchés publics, sur laquelle aurait dû être postée l’annonce de marché pour la statue. « Cet outil s’inscrit dans le souci de la Métropole d’une concurrence encore plus dynamique« , conclut le communiqué d’annonce à ce sujet.
À l’heure actuelle, la Ville de Nice n’a toujours pas procédé au retrait de la statue. Elle s’est exprimée dans des communiqués, mais n’a pas souhaité réagir sur Hexact. La préfecture non plus ne fait pas de commentaires, même si elle précise par mail qu’un “courrier préfectoral va être adressé à la régie Parcs d’Azur pour lui rappeler qu’elle doit exécuter le jugement sans délai”.