UNOC 2025 à Nice : l'enquête de la rédaction

UNOC 2025 : Quand le quartier du port navigue à vue

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Publié le 10 mai 2025 à 22h35
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L’incertitude, parfois même l’inquiétude, monte chez les riverains et les commerçants. En cause, le sommet sur les océans qui mettra sous cloche le quartier du port pendant plus d’une semaine. Tous les acteurs sont partagés entre les effets négatifs potentiels et les bénéfices d’un tel événement à long terme. Reportage.

Il est 14 heures. Hervé prend sa pause. Quelques minutes de repos après avoir déchargé des camions de livraison, dressé les tables et entamé son service du midi. L’employé d’un restaurant sur le quai des Deux Emmanuels profite des quelques rayons de soleil trop souvent masqués par les nombreux nuages inhabituels du jour. À la question, qu’est-ce que vous pensez de l’UNOC, son visage se crispe. « Le sommet sur l’océan ? Une hypocrisie ». Lui qui connaît si bien les mers. Lui qui les traversait dans une autre vie, de Madagascar jusqu’à poser les amarres au port Lympia. « J’ai vu l’état de l’océan se dégrader, notamment sur la traversée des baleines. Il faut absolument arrêter la chasse de ces grands cétacés. Tout ce que l’on peut espérer, c’est que ça porte ses fruits », se résigne Hervé. 

Un manque à gagner pour certains

À l’approche de la conférence, qui se tiendra du 9 au 13 juin, se cache surtout une incertitude, voire une inquiétude pour les riverains, les pêcheurs et les commerçants. « On s’y prépare, mais tout risque d’être très compliqué. Le manque à gagner va être énorme pour nous », grince Franck Simonetti, gérant du magasin Zahati. 

Un sentiment partagé par Murielle qui tient Mobalpa sur le quai Lunel, du côté du nouveau Palais des Congrès. Malgré sa présence aux deux réunions publiques d’information sur l’événement, elle se pose encore de nombreuses questions sur le dispositif de sécurité. Pendant neuf jours, la colline du château, les quais du port et les ruelles des deux rives vont être mis sous cloche. Dès le 5 juin, aucun véhicule ne pourra circuler et l’accès aux piétons sera possible seulement pour les riverains. Avec de telles restrictions, Murielle a pris sa décision : son établissement sera fermé. « Je ne vais pas vendre des cuisines aux congressistes. On va devoir rattraper cette fermeture sur les 15 derniers jours de juin », admet la gérante.

Une promesse pour d’autres

Si certains plieront bagages pendant plus d’une semaine, d’autres commerçants espèrent tirer profit des milliers de congressistes attendus, entre chefs d’État, scientifiques, ONG et associations. C’est le cas de la confiserie Florian. « Nous allons mettre des produits à la vente tournés vers les touristes. Nous espérons faire un peu de chiffre, même si nous savons qu’ils ne seront pas ceux habituels », pointe Josy, assistante de directrion de la boutique du port. L’espoir d’un événement attractif ne cache pas l’amertume des travaux des derniers jours pour installer toutes les structures. « Il y a des nuisances qui nous impactent. Le parking est fermé depuis deux semaines, donc il y a moins de cars touristiques. C’est un manque à gagner. Mais nous espérons que ce sera un lieu attractif après le sommet », se veut optimiste Josy.

C’est justement ce qui réjouit Claire Lopetrone. La propriétaire d’Arto Vivi et d’Ô Cap sur le quai des Deux Emmanuels est ravie que la lumière se porte enfin sur le quartier du port. « Le port était une escale. Grâce au Palais des Congrès, il va devenir une destination », veut-elle croire. Les restaurateurs ont surtout appris une bonne nouvelle : la mise en place d’un ticket restaurant à hauteur de 22 euros au lieu d’une cantine souhaitée au départ par l’ONU. « Le ticket n’est pas énorme, mais ça va. Nous nous sommes habitués à avoir une clientèle pressée et de passage depuis de nombreuses années. Le tout va être d’inclure, dans ce tarif, des spécialités niçoises », estime Claire.

Riverains et pêcheurs aussi impactés

Au-delà des commerçants et restaurateurs, les habitants et les pêcheurs se préparent aussi à s’adapter à l’UNOC. Toutes les activités cesseront dès le 5 juin, jour de l’inspection et du déminage de tous les bateaux. « Je ne vais plus pouvoir sortir en mer et pêcher », regrette Serge en pleine réparation de sa barque. S’il sait la notoriété que va gagner Nice grâce à ce sommet, le marin ne perd pas tout à fait le nord. « Un geste sur la redevance au port ? Je suis partisan ». De leur côté, les riverains restent quelque peu perplexes. Un retour de l’attestation, comme du temps du Covid, ne ravit pas l’ensemble du quartier. À moins d’un mois du début de la conférence sur les océans, la brume ne s’est pas encore tout à fait levée.

L’UNOC va contraindre les pêcheurs et marins niçois à cesser leurs activités pendant plusieurs jours – © Hugo Petitjean