Du 9 au 13 juin 2025 se tiendra à Nice le sommet mondial des océans. L’évènement organisé par l’ONU réunira 5 000 congressistes pour échanger autour de la protection des océans. Mais sous l’aspect vertueux de l’UNOC se cachent de nombreuses craintes et interrogations chez les Niçois.
L’évènement est historique en France. Après s’être tenu à New-York en 2017 puis à Lisbonne en 2022, c’est Nice qui a été choisie cette année pour la tenue de cette édition, coorganisée par le Costa Rica. Des milliers de personnes sont attendues pour prendre part aux échanges, dont une centaine de chefs d’État et de gouvernement.
Un bon signe pour la protection des océans
Le thème est un enjeu cette année : “Accélérer l’action et mobiliser tous les acteurs pour conserver et utiliser durablement l’océan”. Car si les consciences écologiques commencent à s’éveiller, les océans sont déjà en danger : mort des coraux, montée des eaux ou encore pollution plastique (11 millions de tonnes sont déversées chaque année dans l’océan). Pourtant, en plus d’abriter de nombreuses espèces, les océans absorbent environ 30 % des gaz à effet de serre émis sur Terre et sont donc essentiels pour la bonne santé de la planète.
À Lisbonne en 2022, l’UNOC avait permis de réunir 24 chefs d’État pour prendre 700 engagements écologistes et adopter la déclaration de Lisbonne. Plusieurs pays avaient ainsi, à l’issue du sommet, adopté des mesures pour améliorer la protection et la restauration des écosystèmes marins, réguler les pratiques de pêche ou encore lutter contre la pollution marine.
Un Palais des Congrès contesté
Pour cette édition, c’est donc Nice qui a été choisie par le président de la République en 2023. Un challenge pour la municipalité qui, pour accueillir les 5 000 congressistes sur le port de Nice (c’est une volonté de l’ONU), a dû monter un gigantesque Palais des Congrès, en trois bâtiments : un grand palais de 4 000 mètres carré pour les congrès et deux bâtiments annexes. Au total, 6 400 mètres carrés sont sortis de terre en un temps record, entre janvier et fin avril. Le bâti, dont l’apparence est loin d’être identique à ce qui avait été esquissé sur les premiers croquis, est désormais entre les mains de l’État. Mais sa non-pérennité, assumée par la Ville, est pointée du doigt, notamment par les associations écologistes. Lors des premières conférences de presse en mars 2023, le maire de Nice, Christian Estrosi, avait pourtant annoncé une “structure pérenne”.

La durée légale de Nicéa (c’est le nom donné au bâtiment par les Niçois) est également questionnée, le permis de construire accordé à la Ville prévoyant une autorisation jusqu’en décembre 2027. Sans extension de ce permis, le Palais devra être démoli. « Il est peu probable que ce permis soit renouvelé au regard de la mise en garde de l’Architecte des Bâtiments de France », note Jean-Christophe Picard dans un billet de blog. Selon un rapport cité par l’élu d’opposition écologiste à Nice, le bâtiment serait « précaire » et « limité à trois ans ». Pourtant, lors d’une conférence de presse en février, Christian Estrosi s’enthousiasmait : « l’important, c’est d’avoir un Palais des Congrès qui soit utilisable jusqu’en 2050 au moins ».
Une gabegie financière ?
Sur le plan financier, l’évènement est également contesté. S’il est décrit comme coorganisé par la France et le Costa Rica, il n’y a bien que la France qui prendra en charge l’ensemble des coûts financiers, selon un rapport de l’Assemblée nationale. La participation du Costa-Rica n’est, elle, que politique.
Pourtant, cet évènement a un coût pharaonique : il devait coûter 47,7 millions d’euros au maximum, d’après une réunion interministérielle de mars 2024 (c’était 11 millions d’euros pour la conférence de Lisbonne). Selon les dernières estimations, il devrait en réalité coûter plus de 60 millions d’euros, dont 23 millions à la charge de la ville de Nice, le Maire s’étant engagé à financer 10 % du projet.
Des incertitudes pour le quartier du port
Loin de la paperasserie administrative, il y a aussi les commerçants du quartier du port, dubitatifs. S’ils ne nient pas la pertinence d’un évènement en faveur de la planète, les restaurateurs sont inquiets. « Les 28 établissements qui font le tour du port devront faire manger entre 3 000 et 4 000 personnes tous les midis », se réjouit d’abord Christophe Souques, le vice-président de l’UMIH 06, syndicat des restaurateurs et des professions hôtelières. Mais quid du soir : y aura-t-il aussi des congressistes ? Combien ? Pour les restaurants qui feront moins (ou pas) de chiffre, une indemnisation est prévue. « Mais on ne sait pas ce qui est compensé, ni quand nous allons être indemnisés. Si nous recevons les fonds dans un an, il va nous falloir avancer les coûts de personnel et de loyer », s’inquiète le syndicaliste. Il s’avance même sur les secteurs qui ne le concernent pas : « Il y a des sociétés de nettoyage de bateaux et d’affrètement, des bateaux qui promènent des touristes qui ne pourront plus travailler sur le port de Nice. Ils sont en train d’essayer de trouver des solutions pour les mettre ailleurs ». De nombreuses questions pour lesquelles les professionnels attendent des réponses. Le flou, à tout juste un mois de l’évènement.
De nombreux débats qui font parler, dans le quartier et dans la presse, et qui empêchent les Niçois d’accueillir l’UNOC avec bienveillance.